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''En l'an 369 du Troisième Âge''
Aujourd'hui, je n'arrivai pas à me concentrer sur mon travail. Je n'arrêtais pas de regarder par la fenêtre, sans trop savoir pourquoi. Une intuition, sans doute. Après toutes ces décennies de travail, mon esprit percevait beaucoup plus de choses que la plupart des gens.
Mais tout ce que je voyais, c'était le brouillard matinal qui nimbait mon petit village paisible. À chaque fois que je levais la tête de mon œuvre, j'essayais de distinguer, une silhouette, du mouvement à travers la nappe blanche, en vain.
Puis, quand j'avais enfin réussi à me plonger dans mon travail, trois coups frappèrent à la porte.
Je me levai, lourde d'apathie —et aussi à cause du grand âge qui rouillait mes genoux plus que rodés— et me dirigeai pour accueillir mon visiteur. Il s'agissait d'un jeune homme bien habillé, en redingote de feutre et au chapeau bien entretenu. Ce qui me frappa fut qu'il n'était pas du coin. Contrairement aux habitants d'ici, qui avaient la peau bleue, lui avait la peau rouge, comme moi. Enfin, "jeune" de mon point de vue. Il avait facilement plus de cinquante ans.
"Je suis Pelapte, marchand de mon état. Vous êtes bien Nuope, l'artisane ? J'aimerais discuter avec vous pour une commande un peu spéciale."
Je le dévisageai de haut en bas, incrédule. "Oui, c'est bien moi. Vous voulez que je vous serve un thé ou un café, pendant qu'on parle de ça ?"
Le bourgeois sourit et je le fis entrer.
"Jolie redingote," remarquai-je.
"Merci ! J'en suis très fier, je l'ai faite venir du cercle Akva, ma ville natale. Ça me rappelle un peu le pays."
Nous nous essayâmes et je servis le thé.
"Ça fait longtemps que vous êtes dans la région ?"
Il but à petites gorgées. "Environ quatre ou cinq ans ? Mais j'habite plus bas, à deux heure du Havre. C'est rare que je vienne aussi haut dans la montagne."
"Comment avez-vous entendu parler de moi

Version du 17 juin 2023 à 23:46

Le petit sifflet de laiton
RecueilPetit Jardin en Fleur
TypeNouvelle
ÉtatBrouillon

Le petit sifflet de laiton

En l'an 369 du Troisième Âge

Aujourd'hui, je n'arrivai pas à me concentrer sur mon travail. Je n'arrêtais pas de regarder par la fenêtre, sans trop savoir pourquoi. Une intuition, sans doute. Après toutes ces décennies de travail, mon esprit percevait beaucoup plus de choses que la plupart des gens.

Mais tout ce que je voyais, c'était le brouillard matinal qui nimbait mon petit village paisible. À chaque fois que je levais la tête de mon œuvre, j'essayais de distinguer, une silhouette, du mouvement à travers la nappe blanche, en vain.

Puis, quand j'avais enfin réussi à me plonger dans mon travail, trois coups frappèrent à la porte.

Je me levai, lourde d'apathie —et aussi à cause du grand âge qui rouillait mes genoux plus que rodés— et me dirigeai pour accueillir mon visiteur. Il s'agissait d'un jeune homme bien habillé, en redingote de feutre et au chapeau bien entretenu. Ce qui me frappa fut qu'il n'était pas du coin. Contrairement aux habitants d'ici, qui avaient la peau bleue, lui avait la peau rouge, comme moi. Enfin, "jeune" de mon point de vue. Il avait facilement plus de cinquante ans.

"Je suis Pelapte, marchand de mon état. Vous êtes bien Nuope, l'artisane ? J'aimerais discuter avec vous pour une commande un peu spéciale."

Je le dévisageai de haut en bas, incrédule. "Oui, c'est bien moi. Vous voulez que je vous serve un thé ou un café, pendant qu'on parle de ça ?"

Le bourgeois sourit et je le fis entrer.

"Jolie redingote," remarquai-je.

"Merci ! J'en suis très fier, je l'ai faite venir du cercle Akva, ma ville natale. Ça me rappelle un peu le pays."

Nous nous essayâmes et je servis le thé.

"Ça fait longtemps que vous êtes dans la région ?"

Il but à petites gorgées. "Environ quatre ou cinq ans ? Mais j'habite plus bas, à deux heure du Havre. C'est rare que je vienne aussi haut dans la montagne."

"Comment avez-vous entendu parler de moi